J’avais
croisé son regard pour la dernière fois un Mardi matin. C’était le 12 Janvier
2010. C’était le regard de ma Maman. Marie Evelyne Joseph, était son nom. Elle allait
jeûner au Temple I de la rue de la réunion, à Port-au-Prince. Nous sommes Adventistes
du Septième Jour. Maman était sortie, mais n’était jamais revenue à la maison. C’est
du passé !
Je
la considérais comme une « Madan Sara ». Elle ne savait pas voyager
dans de mauvaises conditions un peu partout à travers le Pays, mais mais vivait
un peu comme les vraies « Madan Sara ». À une époque, elle arpentait
les rues de Port-au-Prince avec une cuvette de sucreries sur la tête. Elle voulait s’assurer que mon grand frère et
moi ne manquons du peu de ce qu’elle pouvait nous offrir.
Aujourd’hui,
je pense à nos milliers de « Madan Sara » qui ont un « Ti Pòl »,
un « Ti Jak » ou une « Ti Janèt » à nourrir. Ça inspire la détermination
d’éduquer et former dans un Pays en agonie, à cause des mauvaises gestions des
dirigeants. Ces femmes, certaines fois seules, ne se lassent jamais. « Pitit
mwen dwe fini lekòl. M pa t rive lwen lekòl pou 50 kòb, pa m yo dwe fini »,
c’est que me racontait ma mère un jour.
Nos
« Madan Sara » doivent être le symbole d’une résistance face à la misère.
Elles doivent aussi être le modèle de rudes travailleurs, hommes et femmes, qui
se libèrent de la chaine de la dépendance et de la paresse. Elles ne
connaissent ni jour ni nuit. Elles sont restées sans maquillage, sans de belles
robes, encore moins de belles chaussures, pour penser à leurs enfants. Elles bravent
les mauvais temps. C’est la preuve d’un amour inconditionnel de toute mère
responsable. Nos « Madan Sara »
sont l’un des piliers de l’économie haïtienne dans le secteur informel. Elles nous
apportent les fruits naturels, sans aucun produit chimique. Elles nous apportent
les vivres alimentaires. Autrement dit, elles nous apportent la vie au cœur de
la Capitale ou des grandes villes de province.
Je
sais que beaucoup parmi vous ne fréquentent pas les réseaux sociaux, mais vos
fils et filles vous diront toute mon admiration. À défaut d’eux, vous qui utilisez
les réseaux sociaux, tachez de leur dire tout mon amour. Car, je suis ce que je
suis aujourd’hui, grâce au dévouement d’une femme qui s’est battue à l’instar des
« Madan Sara ».
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